• Le libre arbitre, fantasme ou réalité? (le point de vue scientifique)

    Tu as décidé d'aller sur ce blog et de lire cet article, n’est-ce pas ? Mais en es-tu absolument certain/e ?

    Pourquoi ce ne serait pas plutôt le fait d’une succession de réactions chimiques, ayant lieu dans ton cerveau, en lien avec un enchaînement de conséquences ou avec ta perception du monde, tes gènes ou encore ton environnement ? C’est l’exacte question que nous allons nous poser ensemble. Accroche bien tes neurones, ça risque de te faire gamberger !

     

    Il me semble que l’essence du libre arbitre est de pouvoir être maître/sse de ses actes. Si là, tu te grattes le bout du nez, c’est parce que tu as décidé de le faire, n’est-ce pas ? Et bien, c’est peut-être un brin plus compliqué que ça :

    Le chercheur John Dylan Haynes a placé des volontaires dans un caisson d’IRM, devant un écran où défilaient des lettres au hasard et leur a placé un bouton dans la main droite et dans la gauche. Une fois installés il leur demandait de presser un des boutons quand ils ou elles en ressentiraient l’envie, et de mémoriser la lettre qu’ils ou elles voyaient au moment de leur décision. Pendant ce temps il a observé les zones actives de leur cerveau.

    Les résultats sont assez perturbants : l’activité cérébrale précède de huit secondes le mouvement et d’environ sept seconde la prise de décision (évaluée grâce à la lettre mémorisée). De plus, le chercheur peut, grâce aux images, prédire quelle main va être active. Il faut cependant prendre de la distance par rapport à ces résultats. En effet, ces prédictions ne sont efficientes que dans 60 % des cas et l’IRM n’est pas très précise ; de plus, bouger la main est loin d’être aussi complexe que les décisions prises quotidiennement.

     

    Cependant, cela est complètement contre intuitif, quand je bouge ma main, c’est parce que je le veux, non ? Et bien, il se trouve que lorsqu’une certaine zone du cerveau, appelée air motrice, est stimulée lors d’interventions chirurgicales, les patient/e/s décrivent une forte envie de remuer tel ou tel membre, et ils et elles ont le sentiment que c’est le fruit de leur volonté. Peut-être que ce qu’on appelle libre arbitre est causé par la stimulation de ces régions du cerveau...

     

    Bien que cet organe soit encore plein de mystères pour nous, nous connaissons encore une autre de ses fonctions qui réduirait notre supposée liberté : il s’agit de la synthétisation des hormones. Ces dernières influencent grandement sur ce que nous appelons communément notre caractère.

    Pour illustrer cela nous allons nous pencher sur la testostérone :

    Cette dernière semble avoir un rapport avec le comportement sexuel des individus : en effet, les hommes avec un taux de testostérone plus élevé que la moyenne sont moins souvent mariés, plus fréquemment divorcés et sont plus promptes à tromper leur conjoint/e. Vous serez sans doute d’accord avec moi si je dis que nous ne sommes pas responsables de ce taux. Mais pourtant nous attribuons ces comportements à la nature de la personne, à ses choix.

     

    Le chercheur Burnam a éclairé une autre conséquence d’un taux élevé de cette hormone dans le sang, et ce, grâce au jeu de l’ultimatum. Ce dernier consiste à partager une somme d’argent, dans le cas présent 40$, entre deux joueurs. Le premier propose une distribution et le second accepte ou non, et dans ce second cas, tout est perdu pour les deux. Le bon sens voudrait que le deuxième joueur accepte toutes les situations ; et donc, en supposant cela, que le premier propose celle qui lui est la plus avantageuse (donc celle où il se remplira le plus les poches). Seulement, on observe que les hommes ayant un taux de testostérone 50 % (ou plus) supérieur à la moyenne refusent un partage inégal. Ainsi, elle a sans doute un impact sur la fierté des personnes. Mais un taux élevé de testostérone ne pourrait t’il pas être une corollaire de ce trait de caractère ?

    Cependant le supposé impact de la testostérone ne s’arrêterait pas là : il pourrait être à long terme. En effet, les enfants ayant été plus exposé /e /s que la moyenne à cette hormone durant la gestation de leur petite maman sont plus promptes à réagir vivement si ils et elles sont agressé /e/s. Elle aurait donc été une actrice déterminante dans la formation de leur « caractère ».

     

    D’autres hormones ont un impact sur notre attitude. Prenons l’exemple de l’ocytocine : une hormone participant au comportement maternelle et favorisant l’empathie. Des chercheurs ont voulu savoir quelle serait son action lors d’un jeu économique à risque.

    Leur dévolu est tombé sur le jeu de l’investisseur consistant à confier une certaine somme à un investisseur (vous me direz, pour le moment c’est assez logique) qui va choisir de garder, ou non, une part de l’argent et de faire fructifier l’autre : elle sera multipliée par 3 par la banque. Cependant, cette somme est remise à l‘autre joueur qui décide de son partage.

    La logique voudrait que l’investisseur garde tout puisque l’autre joueur ne devrait pas partager un quelconque montant reçu. Cependant après prise d’ocytocine, les sujets ont tendance à faire confiance à l’autre de façon beaucoup plus significative que si ils n’en avaient pas consommée. Cet effet n’est pas observé si les joueurs sont face à un ordinateur. On peut donc en conclure que cette hormone favorise la confiance et l’interaction sociale.

     

    Toujours pas convaincu/e que le libre arbitre peut-être plus frêle que ce que l’on imagine ?

    J’aimerais dans ce cas vous parler d’une expérience montrant que notre état corporel peut impacter très fortement sur des décisions importantes, et ce, de façon inconsciente.

    Ainsi un groupe de trois chercheurs ont suivi plus de 1000 décisions de justice et ont dégagé un fait perturbant : La libération conditionnelle de détenus dépend de l’estomac du juge.

    En effet, après avoir mangé leur proportion est de 65 %, alors que juste avant ce chiffre tombe à 0 % . La conclusion que nous pourrions tirer de cela, est que cet état a influencé le jugement de ses décisionnaires, et que probablement ils et elles justifient leurs actes avec des arguments qui leur donnent l’impression que leur choix était tout à fait conscient. Vous et moi ne sommes similaires de ces hommes et ces femmes, pourquoi serions nous différent/e/s sur ce point ?

    Si notre corps influence à ce point notre jugement et notre personnalité alors que nous n'en avons même pas conscience, jusqu’où pouvons nous affirmer que notre libre arbitre s’étend ?

    Il doit exister encore un certain nombre d’expériences scientifiques allant dans ce sens, ou éclairant d’autres aspects du libre-arbitre, mais je vous libère pour aujourd’hui ! Dans un prochain article nous nous pencherons sur la même notion, mais cette fois ci à travers les yeux d’un sociologue.

     


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